L'épaule du sportif - Dr
Philippe Collin, chirurgien orthopédiste 1.
La luxation récidivante de l'épaule
L’instabilité de l’épaule est une pathologie fréquente chez le sujet
jeune et sportif, elle peut s’exprimer de plusieurs façons : luxation,
sub-luxation ou simples douleurs à l’armer du bras.
A. Pourquoi se luxe-t-on ?
L’articulation de l’épaule est la plus mobile de l’organisme . Or
mobilité et stabilité ne
font pas bon ménage, plus une articulation est
mobile, plus elle risque de se déboîter.
Le
manque de stabilité de cette articulation est essentiellement dû à la
forme des surfaces articulaires,
la tête de l’humérus a une
surface beaucoup plus grande que la glène de la scapula, l’essentiel de
la stabilité est donc lié au bourrelet ( fibro cartilage qui entoure la
glène) et aux ligaments. Il suffit d’une petite lésion sur ce dernier
pour que la tête de l’humérus se déboîte. Comme sur la photo ( photo
stabilité n°1), une petite lésion du tee ne permet plus à la balle de
golf de tenir en place (lésion photo n°2).
B. Il y a deux types de symptômes possibles :
-
Soit on retrouve une notion de
traumatisme assez violent avec luxation vraie de l’épaule
ayant nécessité l’intervention d’un tiers externe ou bien passage
dans un service des urgences
pour remettre l’épaule en place, avec
dans les suites, des récidives pour des mouvements de moins
en moins
importants comme le simple fait de se coiffer par exemple.
-
Soit
on contraire on ne retrouve pas d’épisode de luxation vraie mais on
retrouve une notion de traumatisme avec douleurs de l’épaule
et depuis une sensation d’instabilité de l’épaule, lors des
mouvements extrêmes avec plus ou moins une douleur.
C. Faut il faire des examens ?
-
Dans le cadre d’une luxation antéro
interne vraie avec réalisation de radiographies prises
aux urgences avec épaule luxée ( photo instabilité n°4) on peut se
contenter d’une simple radiographie standard ( face plus profil) à
la recherche de stigmates de luxation comme une encoche antéro
supérieure ou une petite lésion au niveau du bord antéro inférieur
de la glène ( photo instabilité n°5).
-
A l’opposé en cas d’épaule
douloureuse et instable sans épisode de luxation vraie,
on demandera alors la réalisation d’un
arthroscanner qui permet de bien visualiser la lésion du
bourrelet.
D. Quand faut
il Opérer ?
-
Lors du
premier épisode de luxation,il n’y a aucune indication chirurgicale,
même si chez les patients de moins de 20 ans, le risque de récidive
avoisine les 80%. On parle d’instabilité antérieure chronique à partir
du 3ème épisode . C’est alors qu’il faut consulter un
spécialiste pour discuter de l’opportunité d’un geste chirurgical.
-
En cas
d’épaule douloureuse et instable,
c’est la gêne dans la vie quotidienne
et la gêne dans la pratique du sport qui fera porter l’indication d’une
intervention chirurgicale.
E. Quelle
technique utiliser ?
Il y a deux
grandes techniques possibles, les techniques dites à ciel ouvert et les
techniques dites endoscopiques.
A
ciel ouvert :
il s’agit de la butée coracoïdienne selon Latarjet ( Chirurgien
lyonnais). Le principe consiste à prélever l’apophyse coracoïde (partie
de la scapula) puis de la fixer à l’aide de deux vis au niveau du bord
antéro inférieur de la glène (photo instabilité n°6 et 7).
-
L’hospitalisation est de 1 à 2 journées, la rééducation est débutée de
façon immédiate et il faut porter pendant 3 à 4 semaines une écharpe
type coude au corps ( cf photo instabilité n°8)
-
Reprise du sport
:
la natation
(brasse) et la course peuvent être reprises six semaines après
l’intervention et tous les sports peuvent être repris entre le 4ème
et 6ème mois en fonction du niveau sportif et du sport
pratiqué.
-
Il s’agit
d’une technique fiable, il n’y a quasiment pas de récidive.
La
technique arthroscopique : l'intervention de Bankart sous arthroscopie.
-
Le principe
consiste à réaliser simplement trois petites incisions de 1 cm et de
mettre une caméra dans l’épaule pour réinsérer le bourrelet (photo
instabilité n°8,9 et 10).
-
Ensuite il
faut porter un gilet type écharpe (cf photo) pendant trois semaines. La
rééducation est débutée après la 3ème semaine. La reprise du
sport se fait selon le même schéma qu’une butée coracoïdienne.
-
Cette
technique a pour avantage d’être une intervention anatomique de
réparation sans cicatrice, elle a pour inconvénient un nombre de
récidives bien supérieur à la butée coracoïdienne (15 à 20 % des cas).

La luxation de l'épaule
après 40 ans
Après 40
ans, un premier épisode de luxation antéro interne est rarement suivi
d’une instabilité résiduelle, par contre il faut toujours rechercher une
rupture de la coiffe des rotateurs associée en faisant pratiquer une
échographie. |
Plan
-
La luxation
récidivante de l'épaule
-
Les entorses et
luxations acromio-claviculaires
-
Les fractures de la
clavicule
Luxation
de l'épaule

A gauche, la luxation. A droite, on
observe une encoche qui favorisera la récidive lors de certain
mouvements
Lésion
du bourrelet


La butée de Latarjet


L'intervention de Bankart

Vue arthroscopique
|
2. Les entorses ou luxations acromio-claviculaires
Il s’agit de
lésions fréquentes qui surviennent le plus fréquemment
au cours de chutes assez violentes
notamment lors de la pratique du judo, du rugby et du ski. Il y a
classiquement quatre niveaux de gravité en fonction de l’importance du
déplacement de la clavicule vers le haut et vers l’arrière.
-
le stade I : il n’y a pas de
déformation et on retrouve une douleur à la palpation de la
clavicule. Le traitement est conservateur par une
simple immobilisation en écharpe
pour une dizaine de jours avec reprise rapide des activités.
-
le stade II : il y a une
légère ascension de l’extrémité latérale de la clavicule, comme pour
le grade I l’évolution est satisfaisante après une
quinzaine de jours d’immobilisation
( cf photo n°1)
-
le stade III : il existe une
ascension de la clavicule ( cf photo n°2) avec une nette
touche de piano. Dans la plupart
des cas ( à l’exception des sportifs de très haut niveau) le
traitement est conservateur. Il ne sert à
rien de vouloir maintenir la luxation par un bandage, le
plus souvent en dehors d’une petite disgrâce esthétique, il n’y aura
aucune séquelle. En cas de douleurs résiduelles, notamment lors du
port de charges lourdes les bras en l’air, on peut être amené à
réaliser à distance une ligamentoplastie
(transfert d’un ligament). Il n’y a aucun risque à pratiquer cette
intervention à distance de la luxation.
-
le stade IV : dans ce cas il
existe une rupture de la chape delto trapézienne avec ascension de
la clavicule en haut et en arrière, le traitement en est alors
quasiment toujours chirurgical
sauf chez les personnes âgées. L’intervention consiste à réaliser un
transfert ligamentaire qui est protégé par deux broches pour une
période de six semaines avec une immobilisation coude au corps
pendant quatre semaines, sans aucune rééducation immédiate.
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?

Stade 2 : saillie de la clavicule
<----Stade 3 : touche de piano

Stade 4 : disjonction complète
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3. Les fractures de la clavicule
Ces
fractures sont extrêmement fréquentes chez le sportif notamment la
pratique du vélo et du moto cross. Dans 90% des
cas le traitement est conservateur : il ne nécessite pas
d’intervention chirurgicale. Même si sur les radiographies initiales les
fragments paraissent déplacés, non alignés la clavicule consolidera sans
séquelle. Il faut alors mettre en place soit des anneaux, soit le plus
souvent un coude au corps simple pour une période de quatre à six
semaines avec ensuite une rééducation simple.
Parfois en
raison de l’importance du traumatisme initial, il existe un écart entre
les deux fragments très important avec un risque majeur de non
consolidation ( cf photo), il faut alors d’emblée mettre en place une
plaque vissée (cf photo) avec mise
en place d’un coude au corps pour une période de quatre semaines dans
les suites opératoires.
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